Croquettes chien : faut-il s’intéresser au taux de glucides ?
En alimentation canine, la tendance actuelle privilégie un retour au naturel, plus en harmonie avec les instincts carnivores des chiens. Dans ce contexte, l’abondance de glucides dans les croquettes suscite des inquiétudes, notamment en ce qui concerne le risque de diabète. Pour ne rien arranger, leur quantité exacte est rarement indiquée sur l’étiquette, ce qui a tendance à renforcer les craintes des consommateurs. Néanmoins, nous allons voir qu’il est possible de la calculer facilement. La question se pose alors : faut-il chercher à minimiser la teneur en glucides et écarter systématiquement les aliments dépassant un certain seuil ?
Comme n’importe quel autre aliment, une croquette pour chien est composée de micronutriments et de macronutriments. Les micronutriments sont essentiels au bon fonctionnement de l’organisme, mais ne sont nécessaires qu’en faibles quantités ; ils comprennent les minéraux, les vitamines ou encore les oligoéléments. Les macronutriments sont quant à eux les composants majoritaires des aliments et ont un rôle – entre autres – de carburant énergétique. Il s’agit des protéines, des lipides et des fameux glucides. Mais trop souvent, ces derniers représentent le macronutriment prédominant dans les croquettes.
Les croquettes, un aliment particulièrement riche en glucides
Les croquettes ont la particularité d’être d’avoir une forte teneur en glucides, même si cela peut varier grandement en fonction des recettes et des marques. Avec les meilleures croquettes chien sans céréales, très riches en viande, on peut avoir un taux de glucides qui avoisine les 20%, rarement moins. Mais le plus souvent, ce taux dépasse les 35-40%, et peut même atteindre 60% ! A titre de comparaison, les glucides représentent moins de 2% de la composition d’une proie qu’un chien pourrait manger dans la nature. Face à ce constat, de nombreuses personnes s’inquiètent de l’effet que pourrait avoir une telle concentration en sucres sur la santé de leur fidèle compagnon.
Car quand on pense glucides, on pense calories, on pense glycémie, et le bon sens nous pousse donc à éviter tout excès. En réalité, il existe différents types de glucides, et certains d’entre eux ne sont pas digestibles : ils n’apportent donc pas de calories, et ils n’ont aucun effet sur la glycémie. Pour autant, ils ont un rôle indispensable, notamment pour améliorer la digestion. Mais voyons tout cela plus en détail !
Les différents types de glucides
Petit rappel de chimie. Les glucides sont des composés constitués d’un ou plusieurs sucres simples, les oses. Seuls les sucres simples (qui correspondent donc à un seul ose, comme le glucose ou le fructose) peuvent être assimilés et passer dans le sang, et donc jouer sur la glycémie. Une fois dans le sang, ils servent directement de carburant énergétique pour l’organisme, ou bien sont stockés sous forme de glycogène.
Les fabricants de croquettes pour chien ne mettent pas de sucres simples dans leurs recettes. Par contre, ils utilisent des ingrédients végétaux (céréales, pommes de terre, légumineuses) qui eux, contiennent des glucides complexes, c’est-à-dire formés d’une chaîne de plusieurs oses. L’amidon, par exemple, est un assemblage de plusieurs glucoses liés entre eux, jouant ainsi le rôle de réserve d’énergie dans le monde végétal.
Les glucides complexes peuvent être assimilés à la condition de posséder les enzymes capables de casser les liaisons entre deux oses, pour libérer des sucres simples qui pourront alors être absorbés et passer dans le sang. Ainsi, nos amis canins sont parfaitement capables d’assimiler l’amidon car leur équipement enzymatique comprend l’amylase, la maltase et l’isomaltase, les 3 enzymes nécessaires à la digestion de l’amidon.
Par contre, ils ne peuvent pas digérer certains glucides complexes comme la cellulose. Ces glucides indigestibles sont ce qu’on appelle les fibres alimentaires. Comme ces fibres ne peuvent pas être décomposées en sucres simples, elles ne sont pas une source de calories, et elles n’ont aucun impact sur la glycémie, qui rappelons-le, correspond au taux de glucose dans le sang. Par contre, ces glucides indigestibles ont des effets bénéfiques sur le confort digestif du chien.
D’une part, les fibres dites insolubles (qui ne se dissolvent pas dans l’eau) ont une action mécanique sur le transit intestinal : en absorbant les liquides digestifs, elles gonflent et stimulent les mouvements du tube digestif. D’autre part, il existe aussi des fibres solubles qui, elles, vont pouvoir être fermentées par les bactéries de la flore intestinale. Cette fermentation produit des acides gras qui vont 1) aider au bon développement du microbiote, et 2) contribuer à la création d’un environnement acide qui permet de lutter contre les mauvaises bactéries.
Calcul du taux de glucides dans les croquettes pour chien
Après avoir fait le point sur les différents types de glucides, intéressons-nous à leur concentration dans une croquette pour chien. Il faut savoir que la réglementation n’impose pas aux fabricants d’indiquer cette valeur sur leurs paquets de croquettes. En effet, s’il est obligatoire d’indiquer les taux de protéines et de lipides, en ce qui concerne les glucides, seul le pourcentage de la cellulose brute (qui ne représente qu’une partie des glucides) est requis sur les étiquettes. Et dans les faits, la concentration totale en glucides n’apparait que rarement.
Pour connaître la part des glucides dans la composition d’une croquette, on en est donc réduit à faire un calcul simplifié. Ce calcul consiste à considérer qu’une croquette est la somme des protéines, matières grasses (lipides), glucides, minéraux et eau qu’elle contient. A part pour l’eau et les glucides, les pourcentages de tous ces composants sont indiqués (précisons tout de même que les minéraux sont généralement désignés « cendres brutes » sur l’étiquette). Et comme il y a généralement 10% d’eau dans une croquette pour chien, on peut donc facilement estimer le taux de glucides :
%Glucides = 100% – %Protéines – %Lipides – %Minéraux – %Eau
Cependant, comme nous l’avons vu précédemment, il existe différents types de glucides : les glucides digestibles, et les glucides non digestibles (fibres solubles + fibres insolubles). Or, seul le taux de glucides digestibles nous intéresse. Il faut donc affiner notre formule :
%Glucides digestibles = 100% – %Protéines – %Lipides – %Minéraux – %Eau – %Fibres insolubles – %Fibres solubles
Et là, les choses se corsent, car si le taux de fibres insolubles est bien indiqué sur l’étiquette (il correspond au taux de fibres brutes, ou encore au pourcentage de cellulose), le taux de fibres solubles est quant à lui inconnu.
On en est donc réduit à calculer l’ENA (Extractif Non Azoté), qui comprend les glucides digestibles + les fibres solubles :
ENA = 100% – %Protéines brutes – %Lipides – %Minéraux – %Eau – %Fibres brutes
Par abus de langage, on parle souvent de taux de glucides lorsqu’on calcule l’ENA. Mais vous aurez maintenant compris que ce chiffre comprend les glucides digestibles, mais aussi les fibres solubles, qui elles n’apportent pas d’énergie.
Un taux élevé de glucides dans les croquettes pour chien est-il rédhibitoire ?
Maintenant que nous avons vu comment déterminer le pourcentage de glucides dans les croquettes pour chien, une question se pose : faut-il utiliser cette information pour choisir les aliments de nos compagnons canins, en privilégiant les produits avec un ENA le plus faible possible, et en écartant ceux qui dépassent un certain seuil ?
Tout d’abord, sachez que le chien n’a pas besoin de glucides digestibles (comme l’amidon) dans son alimentation, si elle est suffisamment riche en protéines. En effet, son organisme est capable de transformer celles-ci en glucose via la néoglucogenèse, et ainsi subvenir à ses besoins en énergie.
Alors, par principe de précaution, on pourrait préférer donner à son fidèle compagnon des croquettes sans glucides, donc sans végétaux (sources d’amidon), et avec uniquement de la viande. Après tout, le chien est carnivore. Malheureusement, c’est impossible : la présence d’amidon est absolument nécessaire dans le processus de fabrication des croquettes. Pour faire un gâteau, vous avez absolument besoin de farine pour amalgamer la pâte, la lier. Pour les croquettes, c’est pareil avec l’amidon : c’est lui qui va permettre d’obtenir une texture solide et croustillante. Sans amidon, on aurait une texture friable qui ne se lie pas, un peu comme du sable mouillé. Les petfooders sont donc obligés d’intégrer des sources d’amidon – et donc de glucides – dans leurs recettes. Et heureusement d’ailleurs, car une alimentation sans glucides, c’est aussi une alimentation sans fibres. Avec à la clé pour votre animal de compagnie, une constipation et de l’inconfort digestif.
Donc, si les croquettes contiennent forcément des glucides… Y a-t-il une recommandation sur un éventuel taux à ne pas dépasser pour choisir les meilleures croquettes pour chien possibles ? Pas vraiment. Déjà car le taux de glucides (ou plutôt l’ENA) n’est pas une valeur fiable. Ensuite, il n’a jamais été démontré qu’une alimentation riche en sucres pouvait présenter un risque particulier pour la santé de l’animal.
Les glucides et le risque de diabète chez le chien
En fait, le chien est carnivore, oui, mais c’est plus précisément un carnivore opportuniste. En vivant au contact de l’homme pendant des millénaires – et en prenant l’habitude de manger des restes de table, souvent riches en céréales – son régime alimentaire s’est adapté. Nos fidèles compagnons sont aujourd’hui parfaitement capables d’assimiler les glucides complexes comme l’amidon. Il s’agit là d’une source d’énergie tout aussi intéressante que les protéines.
C’est pourquoi, plutôt que de s’inquiéter d’un taux de glucides trop élevé dans des croquettes pour chien, il vaut mieux s’assurer que l’aliment 1) permette de couvrir les besoins en protéines de l’animal (il est alors judicieux de s’intéresser au calcul du RPC chez le chien), et 2) ne soit pas trop calorique et présente donc une densité énergétique adaptée à son profil et son mode de vie. Ainsi, on évite les risques de carences en protéines et de surpoids.